Victor Soussan

né le 28 Mars 1946 à Casablanca

Victor Soussan est le digne représentant d'une race de pilotes qui a peu a peu disparu des paddocks du Championnat du Monde de Motos ... le "pilote privé". Comme son illustre ainé, Jack Findlay, il quitte l'Australie et avec sa femme il décide de vivre l'Aventure du Continental Circus. L'Aventure avec un grand "A", celle, où au bout du chemin, il n'y a rien à gagner selon les critères mercantiles de notre société actuelle ... En effet Victor n'a pas fait fortune sur les circuits du Championnat de France puis du Championnat du monde .. mais il a gagné beaucoup plus ... des amis, des souvenirs, des moments inoubliables. Victor et tous ces "pilotes privés" ont donné un sens à des mots qui se perdent ... espoir, rêve, aventure ... Merci Monsieur Soussan pour votre passion intacte et pour avoir répondu à mes question. Francis 

- Victor, peux tu te présenter ?

Je suis né le 28 Mars 1946 à Casablanca au Maroc. Je suis marié à Jenny depuis et j'ai deux garçons, Patric et Daniel. Je vis actuellement à Melbourne. 

- Tu es né au Maroc et tu deviens Australien comment ?

A l'âge de 15 ans, au moment de l'indépendance du Maroc, comme beaucoup de pieds noirs, mes parents décident de partir ... ils avaient le choix entre la France, le Canada et l'Australie. Comme ma sœur était déjà partie avec son mari à Sydney, mes parents décidèrent de les rejoindre.

- Ton cursus scolaire, professionnel, tu voulais faire quel métier ?J

'ai fait des études secondaires ensuite je me suis dirigé vers un collège technique pour prendre des cours de mécanique, je voulais être mécanicien de course...

- Ton premier « contact » avec un 2 roues ?

C'était à Casablanca, j'avais 12 ans lorsque j'ai conduit pour la première fois un deux roues ... c'était un cyclomoteur. Ensuite j'ai continué en Australie, mais j'étais dans le collimateur de la police de Sydney, alors à force de me faire retirer mon permis j'ai décidé de faire du circuit.

- Ta première course moto ?

J'ai acheté une 250 Suzuki et j'ai commencé la course moto à l'âge de 20 ans à Melbourne, en Australie

.- Quand es tu venu courir en Europe ?J

e me suis marié et à 24 ans avec mon épouse on décide d'aller courir en Europe. Elle avait envie de voir du pays et moi de me frotter aux meilleurs pilotes Européens. Nous avons donc pris le bateau pour un mois de traversée et nous avons débarqué à Londres. J'ai trouvé un petit appartement et un boulot de mécanicien. Le temps de mettre un peu d'argent de coté, j'ai ensuite acheté un vieux camion et une caravane et j'ai écumé les circuits anglais avec une Yamaha TD1C. En 1972 j'ai fait 32 courses ou meetings en Angleterre et j'ai même couru le TT sur l'Ile de Man que j'ai termine à la 6e place.

- Et la France ?

En 1973 j'ai emménagé à Guyancourt, j'avais une tante qui habitait dans la région parisienne. Je voulais participer au championnat de France, j'ai trouvé un boulot de mécanicien chez Britannique Motos et j'ai acheté une TD3, boite six vitesses et embrayage à sec et j'ai fait de bons résultats dans ce championnat très relevé. 

- Ensuite tu fais les Grands Prix ?

Grâce à mes bon résultats, j'ai pu obtenir une licence inter et j'ai fait les Grand Prix en catégories 250 cc et 350 cc ... mais c'est une course inter en 1974 qui m'a fait connaître des organisateurs. C'était la course des 250 organisée lors des 200 Miles du Paul Ricard, je me suis bagarrée pour la victoire avec Patrick (Fernandez) et Gérard Choukroun ... c'était génial ! Je n'ai jamais été un pilote de haute classe, mais je me suis quand même pas mal débrouillé.
A un moment mon nom est apparu dans la presse italienne, on faisait de moi un possible pilote officiel Morbidelli ... mais je n'ai pas eu cette chance de pouvoir piloter une moto d'usine. Je ne regrette rien, j'ai bien vécu et j'ai eu la chance de ne jamais me faire très mal. Hormis une cheville qui me gène de temps en temps je suis en pleine forme

- Ton palmarès ?

Mon meilleur résultat en Grand Prix a été au Venezuela, j'ai terminé troisième dans la classe 250 cc. J'ai aussi terminé 3e et 4e du GP de France. J'ai fait pas mal de bons résultats et de podiums lors de courses inter. Mon meilleur résultat en Championnat du Monde a été 9e en 350.

- Les pilotes qui t'ont marqué à l'époque ?  

L'un de mes meilleurs amis est Patrick Fernandez avec qui je suis toujours en contact aujourd'hui. Je l'ai rencontré en 1973 lors d'une séance d'essai à Dijon Il venait d'Algérie et moi du Maroc, nous avions des choses en communs. Nous avons tout de suite sympathisé. J'ai d'ailleurs appelé mon fils Patrick et lui a appelé le sien Victor ... Jarno Saarinen et Mike Hailwood étaient également des pilotes pour qui j'avais une très grande estime 

- Des souvenirs ? 

De supers souvenirs. Je partais sur les circuits avec Patrick et son père, je n'avais ni panneauteur, ni mécanicien, je faisais tout moi même. L'un de mes meilleurs souvenirs est mon dernier podium en Grands Prix. C'était en 1979, au Venezuela, il faisait plus 50° et tous les matins le père de Patrick nous obligeait à faire un footing en cuir, casque gants et bottes afin d'être en forme pour la course ! 

- Qu’as-tu fait après avoir été pilote ?

Après mes dernières courses en 1980, je décide de retourner en Australie. Ma famille et celle de ma femme était là bas. Et après cette vie de bohème elle avait envie d'avoir une vraie maison et des enfants. A mon retour à Melbourne j'ai tout reprise à zéro et j'ai fait tellement de chose qu'il me faudrait des années pour t'expliquer tout que j'ai vécu après avoir arrêté la course moto. Je peux quand même te dire que je suis fier d'avoir obtenu quelques record de captures dans la pêche au Marlin que je pratique sur les côtes de la Nouvelle-Galles du Sud en Australie ! 

- Roules tu encore en moto ? 

J'ai récemment vendu ma magnifique CBR Fireblade que j'avai "trafiquée" avec beaucoup d'options et d'accessoires trop nombreux pour les mentionner. Aujourd'hui je roule en Audi A4  

- As tu gardé des contacts avec le monde de la moto ?

Oui, tous les ans je vais en Europe pour suivre les Moto GP avec l'équipe Tech3

- Des projets ?

Là, je reviens tout juste du MotoGP à Phillip Island où j'ai aidé les équipes Françaises et je serai là-bas pour le Superbike en Février et j'ai le projet de conduire un camping-car pour un coureur français en 2011.

Interview réalisé en novembre 2010 pat Francis Boutet