Il y a longtemps que je voulais faire un article sur Roger Ruiz. Avec son casque rayé de bandes blanches, c'est un pilote dont je suivais les performances dans les années 70. Suite à sa victoire au Bol d'Or 1972, on a vite collé une étiquette de pilote d'endurance à Roger, mais Roger Ruiz c'était également un excellent pilote de vitesse et ses performances en catégorie 750 ont démontré qu'il pouvait tenir tête aux meilleurs. En ce mois de mai 2009, François Gomis est allé à la rencontre de Roger Ruiz qui lui a confié ses joies et ses regrets. Merci à François pour ce bel article et merci à Roger pour sa gentillesse, sa disponibilité et sa passion intacte. (certaines photos sont issus de la collection personnelle de Roger) Francis
Roger Ruiz occupe une place à part au panthéon des figures mythiques des années 70. Vainqueur du Bol d’Or 1972 avec Gérard Debrock sur une Honda de la légendaire écurie Japauto, dont il sera le pilote fétiche, Ruiz a bagarré pendant une petite vingtaine d’années sur bon nombre de circuits avec une hargne et une ténacité reflétant un caractère plus qu’entier. Avec lui, l’interrupteur à une seule position : on. Le off, il ne connaît pas.
Venu à la moto par son frère, à l’origine du M.C. La Villette (du nom d’un quartier nord de Paris), Roger est de ceux dont la carrière peut être vue de deux façons : le verre est aux trois-quarts pleins, ou un quart vide.
Parce qu’il a le plus beau des trophées d’endurance à son palmarès, qu’il s’est frotté aux plus grands avec notamment sa 750 Yam, sa réussite est magnifique.
Parce qu’il a été pilote d’usine (Honda) une seule année en 1976, qu’il aurait pu (du ?) être champion d’Europe d’endurance cette année-là (le décompte final des points a été modifié … après la dernière course !), il a sans doute manqué à ce moment une marche d’importance, la plus haute
.Mais, fidèle à son personnage, Ruiz assume, même si certaines choses lui restent en travers de la gorge. Reste que, lorsqu’il raconte comment il expliquait aux ingénieurs Honda qu’il fallait faire comme ci et non pas comme ça, vous ne pouvez que penser que le mot diplomatie n’est pas dans son dictionnaire ! Christian Léon, officiel Honda également, lui en fera la remarque, disant en substance : « un pilote d’usine, ça la ferme ».
Peu importe que Ruiz ait raison, peu importe qu’il comprenne instinctivement la mécanique, qu’il soit rapide et fiable, Honda le l’a pas gardé. Et même avec son titre de vice-champion d’Europe, couronnée par une victoire à Truxton, il a été rayé de la liste.
On comprend mieux sa réussite avec Japauto, écurie où tout était basé sur l’humain, menée avec brio par un homme d’affaires plus que passionné, Christian Vilaséca, qui, en 1968, a créé près de la place de l’Étoile à Paris une des plus grandes concessions Honda du monde. C’est d’ailleurs une autre figure de la moto, Robert Assante, ancien pilote et second de Christian Vilaséca, qui remarquera Ruiz en 71 et lui mettra le pied à l’étrier. Roger dit d’ailleurs « Monsieur Assante » quand il en parle. La suite, on la connaît. Une carrière plus que remplie. Des endurances par dizaines, des tours de France, le championnat F.I.M 750, etc.
En plus, avec Roger, les anecdotes fourmillent. Son 50 Ital qui avait 5 vitesses et 6 points morts !
Comment Robert Assante l’a engagé ? Un jour, Roger lui a donné une coup de main sur un circuit, comme ça, pour rien, avec sa générosité habituelle, dans le style « laisse-moi faire, c’est fastoche ».
À Spa, il pleuvait tellement que personne n’y voyait plus rien. Sauf Roger qui collait un paquet de secondes à tout le monde, avant de rendre la main se rendant compte qu’il risquait de percuter un autre concurrent, à cause de la différence de vitesse. Jean-Claude Chemarin a alors été voir les organisateurs pour qu’ils neutralisent la course avec comme argument : « Même Ruiz dit que c’est dangereux »…
Au Norisring en Allemagne, en 750, il fait deux derrière Agostini. Le troisième est l’américain Pat Evans (qui s’est tué à Imola en 77). Roger est obligé de jouer des coudes pour monter sur le podium. Personne ne le connaissait… Ça le fera toujours rigoler.
Pour lui, se jeter sur une fraiseuse et un tour pour fabriquer un arbre à cames est un jeu d’enfant. Puis il vous fait un croquis d’un moteur électrique triphasé à démarrage étoile/triangle et précise en passant que, sauf en 76, il a toujours travaillé à côté des courses de moto.
Aujourd’hui, la passion est intacte. Roger Ruiz a fait ces dernières années les endurances « Classic » avec Yves Géniès (qui a couru en critérium 750 dès 1973, bien avant TF1).
Début 2009, Roger s’occupait en réalisant à la demande des engins et machines en tous genres et en montant dans le garage de son pavillon de Montfermeil (neuf-trois toujours) une 4 pattes pour la piste. Précision : toutes les pièces sont de récup ou de fabrication maison… « Suffit d’adapter » !
Comment voulez-vous qu’une telle personnalité s’entende avec des ingénieurs nippons… N’empêche que c’est bien Roger qui a gagné, entre autres, un Bol d’Or. Alors le verre, aux trois-quarts pleins ? Et pourquoi pas plein à ras bord ?
François Gomis (Mai 2009)
PALMARES
1972 : Vainqueur du BOL d'OR associé à Gérard Debrock (950 Japauto)
1974 : Vainqueur des 1000 km du Mans associé à Gérard Choukroun (Kawasaki 1000)
1974 : Champion de France National 500 cc
1975 : Vainqueur des 1000 km du Mans associé à Christian Huguet (Yamaha 350)
1975 : 2e Course internationale de Rouen catégorie 250 cc (1er Français)
1975 : Vainqueur Coupes Eugène Mauve (Trophée de France 750 cc)
1975 : Vainqueur des 24 H de Liège (avec Christian Huguet)
1976 : 18e du Championnat d'Europe 750 cc (5e à Nogaro)
Roger a également participé au Tour de France Moto sur Japauto
Une anecdote d'Olivier Claire
Avec mon Patrick LION nous allons chez Moto Revue fin 1977 pour prendre les dossiers d'inscription pour la Coupe KAWA.
Nous sommes assez impressionnés parce que c'est Jean Claude BARGETZI himself qui nous reçoit et nous explique tout. Au moment où il a fini, passe un gars qui entre dans la conversation.
Au bout d' 1/4 Heure, ce gars nous dit (JCB nous a enfin dit que c'était Roger RUIZ) : "comment vous n'avez pas réglé votre vilebrequin ???? Venez à l'atelier, je vais vous montrer" ... 3/4 heure après on savait quoi mesurer, comment modifier....Super ! 1 seule rencontre mais impressionnant de gentillesse.
VIDEO INTERVIEW ROGER RUIZ |
Il y a longtemps que je voulais que BIKE70 fasse une interview de Roger Ruiz. Avec son casque rayé de bandes blanches, c'est un pilote dont je suivais les performances dans les années 70. Suite à sa victoire au Bol d'Or 1972, on a vite collé une étiquette de pilote d'endurance à Roger, mais Roger Ruiz c'était également un excellent pilote de vitesse et ses performances en catégorie 750 ont démontré qu'il pouvait tenir tête aux meilleurs. En plus d’être un très bon pilote, c’est une personnalité très attachante. Merci Roger d’être ce que tu es… Francis.
Interview Jean Claude Jacq Montage Francis Boutet BIKE70 - FFM