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Johnny Cecotto

Né le 25 -1-1956 à Caràcas (Vénézuéla) 

Photos : Manfred Mothes - http://highsider.com/textlager/venezuela_textlager/Cecotto.htm

Mais d'où viens tu Johnny ?

Grand prix de France 1975 . Le Castelet ouvre la saison. Normalement, de ce premier GP, on devrait retenir, d'abord la belle performance d'ensemble des français*. Ensuite, en 125, Jorg Möller a développé la Morbidelli tout l'hiver et le duo Kent Andersson - Yamaha aura beaucoup de mal à reconduire son titre si Bianchi et Pileri ne se neutralisent pas comme ça a été le cas en France : partis devant, largement en tête, ils sont tombés tous les deux. En 500, Agostini a gagné devant H. Kanaya et les MV ce qui est de bonne augure pour le titre. Pourtant, tous ces faits font figure d'anecdotes; malgré sa victoire en 500, Agostini  lui même est annoncé comme étant "sur le déclin" pour les uns, "fini" pour les autres. Pourquoi ? Ago vient de se faire taxer par un nouveau venu en 350... C'est la bombe du GP de France 1975... Un jeune Vénézuélien de 19 ans, tombé de nulle part, avec des yams privées, a réalisé un doublé incroyable en 250 et en 350 ! Son nom, Johnny Alberto Cecotto. 

Une semaine après, Johnny remet le couvert en remportant, en catégorie750, les 200 miles d'Imola. Cette fois ci, pas de doutes, il se passe quelque chose ! En plus de ses dons de pilote indiscutables, Cecotto a une personnalité qui passe bien. Beau gosse, toujours disponible pour le public, qui le lui rend bien, décontracté, adepte des lunettes de soleil, entouré de top models, en fait, c'est LA STAR ! la star tout court. Sheene (absent à ce moment là suite à son crash de Daytona) est aussi une star, mais une star anglaise, façon Rock-Star, style Mike Jagger ou Pete Townshend. La Rolls avec tout l'attirail, top models, hôtels ravagés, histoires sulfureuses etc. Cecotto lui est une star tout court. Peut être la première star motocycliste moderne. Le public s'enflamme, les filles accourent, les sponsors les dollars et les belles voitures aussi. 

En moins d'un mois, le "rookie" est sur orbite ! Mais qui est en fait ce jeune Vénézuélien ? Avant de gagner le GP de France, il a couru trois ans au Venezuela avec le soutien de l'importateur Yamaha local, Andres Ippolito. Ippolito est bien plus qu'un importateur Yamaha parmi tant d'autres. C'est un homme important à la FIM et aussi un homme influent chez Yamaha où il a ses entrées partout, y compris au service course. Son protégé est donc arrivé en Europe avec des Yam certes privées mais en réalité pleines de pièces usine. Sans ôter aux qualités de pilote de Cecotto, on peut même dire que ses motos sont un habile mélange de pièces standards et de pièces usines puisque dans ces années là, le 100% usine n'était pas toujours le meilleur. 

Peu avant le GP de France, Cecotto avait déjà réalisé un exploit en finissant troisième à Daytona en étant parti de la dernière ligne. Mais hormis tout cela, rien. Il a bien 19 ans et découvre l'Europe, le monde des GP, les circuits... tout. A la fin de la saison, il est champion du monde 350. La messe semble être dite... On a eu du Ago pendant 10 ans, là on en prend pour 10 ans de Cecotto ! Pourtant, avec le recul, certains signes montraient déjà que ce n'était pas si évident... Bien sur, c'était sa première saison, bien sur la Yam 250 était fragile mais sur les deux titres promis il n'a remporté que les 350, Villa certes discret mais très offensif ayant su conserver son titre en 250 . Ensuite, déjà à ce moment là, son statut de star semble l'éloigner de son objectif. Enfin, certaines histoires sont étonnantes... Annoncé par certains organisateurs de courses inter, contrat signé, il ne vient pas... Plus stupéfiant, en F750 en Angleterre, sa 750 Yam casse en première manche; son team n'a pas le temps de réparer pour la seconde manche; il n'arrive pas à obtenir de Yamaha le prêt de la seconde moto du pilote d'usine Agostini... Du coup, furieux, il prend le départ de la seconde manche au guidon d'une Suzuki usine !!  

En 1976, Yamaha s'est officiellement retiré des GP mais Cecotto hérite d'une 500 quasi usine et garde sa 350. Pour fêter la nouvelle idole, Ippolito obtient une épreuve du championnat FIM 750 au Venezuela. La saison démarre très fort, victoire à Daytona, second en 500 au GP de France derrière la Suzuki usine de Sheene mais devant toutes les autres Suzuki, second en 350... Mais ensuite, la 500 Yam va vite montrer son manque de compétitivité et il ne fera plus aucun résultat cette saison là en 500. En 350, après avoir gagné deux GP successifs, de même, 1976 se solde par une succession d'abandons.

En 1977, la saison de GP débute... Au Venezuela. pour le retour officiel de Yamaha, Johnny est pilote d'usine en 500. Malheureusement, gravement blessé pendant la course des 350 à Salzbourg, il reste sur la touche de longs mois. Il revient uniquement en fin de saison et gagne deux GP 500 successifs!! Il n'y a toujours aucun doute, Johnny Cecotto va toujours très très vite sur une moto!! 1978 s'annonce bien; la 500 Yamaha usine a progressé, Johnny abandonne les 350 pour se consacrer aux GP500 ( et aux courses de F750). Mais un autre officiel Yamaha débarque sur le vieux continent, Kenny Roberts. Et le nouvel homme fort de Yamaha, ce sera lui, Roberts, pas Cecotto. Pourtant, au plus fort du duel Sheene-Roberts, sur le circuit le plus technique qui soit, Assen, Johnny se rappelle au bon souvenir de tous en gagnant le GP !

En 750 avec la surpuissante OW usine parfaitement adaptée à son pilotage, il connaît plus de réussite puisqu'il obtient son second titre de champion du monde. Même si ses résultats sont erratiques, il reste un grand pilote et a une bonne cote de développeur de pneumatiques. Contrairement à Sheene finalement assez conservateur dans ses choix de pneus, Cecotto est toujours partant pour tester un nouveau concept. Ainsi, il sera le premier à utiliser et faire gagner un gros slick arrière en 750.

1979 sera une saison noire pour le Vénézuélien. Blessé en début de saison, il rate plusieurs GP 500 et son meilleur résultat sera une 5ème place. Pire, en 750 avec la seule moto d'usine engagée, il laisse échapper le titre au profit de Patrick Pons. C'en est trop pour Yamaha et il perd son statut de pilote d'usine.  

En 1980, Cecotto s'aligne en 350 et en 500 avec des Yamaha privées sous l'auvent Venemoto. Il a gardé la confiance de son mentor Ippolito et comme de coutume, sa 350 n'a de moto privée que le nom. Et la liberté d'utiliser un cadre Bimota en lieu et place du cadre Yamaha. Comme en 1975, Johnny semble donc pouvoir profiter des avantages d'une moto d'usine sans en subir les inconvénients... De plus, avec son retour chez Venemoto, Ippolito le serre de près et Johnny semble s'être acheté une conduite. Si en 500 ses chances sont minces, en 350 par contre, avant même le début de la saison, la messe est déjà dite pour beaucoup... La meilleure moto, le meilleur pilote, le titre (rédempteur) sera pour Cecotto, c'est certain. Les bookmakers le jouent à 10 contre 1... Pourtant, quelque part en Afrique du Sud, un homme n'est pas de cet avis, c'est Jon Ekerold. Ce titre en 350, lui aussi, il le VEUT. Il est arrivé en Europe en même temps que Johnny, il a assisté au doublé de 1975 depuis une chambre d'hôpital de Nevers; lui le privé Sud-Africain solitaire et renfermé a observé l'éclosion de la star d'usine Sud-Américaine mais cette fois ci en 1980, leurs destins vont vraiment se croiser. Ekerold a quasiment la même moto que Cecotto avec un développement de moteur différent et que le meilleur gagne avec une kawa bavaroise (Mang) en arbitre. Le début de saison est conforme aux prévisions, Cecotto gagne le premier GP. Mais au second GP au Castelet, l'affrontement Cecotto-Ekerold dure toute la course et d'un intérieur bien déterminé dans la courbe de Signes, Jon taxe Johnny dans le dernier tour. Sachant Cecotto parfois fragile mentalement, Ekerold va ensuite s'occuper de déstabiliser le vénézuélien, bien aidé en cela par le manque de fiabilité de la Yam Venemoto. Toujours est-il que contre toute attente, le titre 350 se joue dans un final haletant entre Ekerold et.. Anton Mang et c'est Ekerold qui décroche la timbale.

A la fin de la saison 1980, Johnny Cecotto annonce qu'il quitte le sport moto pour la course automobile. Un autre Vénézuélien talentueux, Carlos Lavado continuera ensuite avec brio l'histoire Venemoto en GP mais c'est une autre histoire!

En voiture, Cecotto accédera à la F1 où il côtoiera (difficilement) un autre Sud-Américain surdoué mais très travailleur, Ayrton Senna. Malheureusement pour Johnny, un grave accident à Brands-Hatch mettra fin à sa carrière en F1. Mais pas à sa carrière en voiture puisqu'il obtiendra ensuite plusieurs titres nationaux en supertourisme et en V8star allemand. En automobile, tous les teams managers qui l'ont employé dressent le profil d'un pilote charismatique et très talentueux , très bon metteur au point mais aussi... très sérieux "un exemple pour les jeunes pilotes" peut-on lire à son sujet!En 2007, le fils d'Andres Ippolito, Vito Ippolito a été élu président de la FIM.*GP de france 1975: Aymé-Loiseaux, Baldé, Bouzanne, Choukroun, Guignabodet, Huguet, Maingret, Pons et Rougerie ont fini dans les 10 premiers de leurs catégories respectives.

Gilles CHABANOL 



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